lundi 22 février 2010

Vu de l'intérieur

- Bon Dieu, cela fait un petit temps que je ne suis plus passé par ici...

- Durant quelques jours, je découvre les coulisses d'une sympathique émission qui cartonne sur RTL-TVI. Quand le candidat est à la fois maladroit et fin cordon bleu, c'est amusant. Quand un autre est bien organisé et moins loquace, ça l'est beaucoup moins. Je découvre les joies du dérushage et des codes à respecter pour que ça passe sans souci sur RTL (et M6). Plus que six jours de boulot. Ça me donne faim, tout ça.

- Quelques nouveaux CD's qui tournent beaucoup ces temps-ci:

On est pour ma part loin de la déception annoncée. Laura continue d'explorer son univers qui lui est propre. Cet album-ci se fait plus épuré, plus doux, et contient des perles de chansons qui resteront parmi les plus belles qu'elle ait écrites.


Très bel album qui fait oublier l'opus précédent (Hombre Lobo, que je n'écoute déjà plus). Le songwriter barbu chante sa rupture à coups de mélodies simples mais efficaces, comme toujours avec E. Mais ici il se fait plus direct, plus modeste, plus touchant. L'inspiration, rayon mélancolique, de ses premiers albums semble lui être revenue. Reste à voir comment l'album vieillira.



Deux raisons à l'achat. La première, c'est Le Sacre du Printemps (dans son entièreté, cette fois), par le Berliner, dirigé par Sir Simon Rattle. Ca déménage. La deuxième, c'est le score subtil et très inspiré de Gabriel Yared (Le Patient Anglais, La Vie des autres, etc.).



- Un petit Keaton à la CINEMATEK, cela fait toujours plaisir. Le pianiste était une femme, et il y avait des rires d'enfants dans la salle. Et puis, Sherlock Jr, on ne s'en lasse pas. C'est une succession de scènes d'anthologies, sur une petite heure de temps. Une pure merveille.



- Quelques films récents vus en salle, par ordre de préférence:

Fantastic Mr Fox ***, de Wes Anderson

Je n'avais jamais accroché aux films de Wes Anderson. Je garde un souvenir très tiède de La Famille Tenenbaum et de La Vie Aquatique, et j'avais rejeté en bloc son Darjeeling Limited, sorte de bonbon branchouillard, coloré-mais-mélancolique-quand-même, où l'auteur était tombé dans sa propre caricature.
Virage à 180° pour son Fantastic Mr Fox: c'est une brillante réussite. Le film opère la jonction parfaitement équilibrée entre la patte de son auteur (quelques tics de mise en scène mais également ses thèmes les plus chers) et l'imagination délirante de Roald Dahl. Je me suis régalé de bout en bout, le sourire aux lèvres de la première à la dernière minute. Malgré la foule de gags et de répliques très drôles, il reste même de la place pour des moments plus touchants. Puis, Fantastic Mr Fox est avant tout un magnifique film d'animation "image par image", un réel enchantement pour les yeux. Les oreilles sont bien servies elles aussi par la bande-son géniale (le score d'Alexandre Desplat + du juke-box solide + des surprises) et un casting vocal de premier choix (Clooney, Meryl Streep, Jason Schwartzmann, Bill Murray, Michael Gambon, Willen Dafoe..). Les personnages sont bien trempés, et beaucoup de scènes restent en tête (celle du loup... une des scènes de l'année). Il manque juste un petit peu d'huile dans la mécanique du scénario, parfois décousu, mais au final j'ai bien pris mon pied, et ça finira dans le top de l'année. Courez-y.

Gainsbourg (vie héroïque) **, de Joann Sfar

Bon, il va de soi qu'un quart d'heure d'images d'archives restera toujours plus fascinant que ce film, mais je le trouve étonnant et plutôt réussi. Certes, on n'apprend pas grand chose. Le scénario, Dieu merci, est linéaire (remember La Môme?), mais propose une suite de petites vignettes. Un procédé qui finit par gêner dans la dernière partie. Le film fonctionne moins bien dans ces 20 (30?) dernières minutes, souffrant de trop grosses ellipses et de survolages trop rapides. Mais la première heure, dont l'enfance et les débuts, est bien plus emballante.
Le film est pourtant une objet filmique très étonnant. L'auteur de BD Joann Sfar a su apporter quelques belles idées "graphiques", et j'ai vraiment accroché à cette "vision fantasmée" (car ce n'est que ça) de ce génie de la musique. Sfar s'est amusé à imbriquer, et ce constamment, la reconstitution des faits avec la vision fantasmée que l'on peut avoir de l'artiste, de sa vie, de son œuvre. Le film, qui se veut "conte", réussit par ce biais à se présenter comme un "hommage", plutôt que comme un grand biopic mouliné selon les codes du genre.
J'ai aussi été heureux de voir qu'Eric Elmosnino était également un excellent comédien, et pas seulement un quasi-sosie bien maquillé. Laetitia Casta (en Bardot) et Lucy Gordon (en Birkin) sont parfaites. Et puis, il y a les Frères Jacques. Et Brassens. Dommage pour le perso de France Gall, complètement massacré. Autre bon point, la direction musicale, assurée avec brio. Le contraire eut été un comble.

The Wolfman **, de Joe Johnston
Pour ce retour du film de Loup-Garou (quasi un genre en soi), Universal a dépoussiéré un de ses vieux tiroirs et produit (non sans mal) une version moderne du film originel (de 1941).
Bon, ça ne révolutionne en rien le genre mais le résultat est plutôt plaisant. Esthétiquement, il y a de quoi apprécier la reconstitution d'époque (XIXème), les décors, le look "rétro" du Loup-Garou (à mille lieues de la version harrypotterienne). Cette ambiance d'époque agrémentée de transformations convaincantes et d'effusions d'hémoglobine satisfaisante, ça fait plaisir. On n'atteint pas la classe visuelle qu'était Sleepy Hollow, mais le spectacle est réussi. Là où il l'est beaucoup moins, c'est au niveau du scénario. L'idée de se la jouer grand drame (romantico-)antique à coups de complexe d'œdipe se trouve vite minée par la déplorable prévisibilité de l'histoire. Très vite, on a une scène d'avance. Danny Elfman, qui n'a pas joué dans la subtilité, essaie de rattraper la sauce avec sa musique tragico-gothique omniprésente, souvent gonflante. Pourtant, la séance n'est pas déplaisante car cela reste un film d'honnête facture, porté par des comédiens qui font bien leur job. Anthony Hopkins est très à l'aise dans son registre menaçant. Wolfman est un film de studio sympathique, mais trop peu original pour vraiment marquer.

vendredi 12 février 2010

Elégance

- Midlake, à l'Ancienne Belgique

Hier soir, les texans de Midlake étaient à l'AB (Box) pour défendre la sortie de leur troisième album, The Courage of Others (sorti le 1er février). Un album étonnamment triste, au caractère fragile et grandiose à la fois, dont ils ont joué la quasi-totalité des titres. En tournée, les 5 ont embarqué avec eux les deux musiciens qui ont participé à l'enregistrement du disque. Dans le combo de 7, nous comptons 4 guitares - sans compter la basse. Frayant son chemin à travers ce champ de cordes, un instrument à vent ne cessera jamais de survoler les couches sonores: la flûte traversière. En solo ou en duo.
Dès l'introduction, sur "Winter Dies", le ton est donné: la mélancolie, la flûte qui virevolte, le crescendo tripant, l'envahissement des guitares, le retour à la douceur. Sur scène, les chansons du Courage of Others se révèlent, encore plus belles. Le groupe les enchaîne, tantôt très douces, tantôt plus bruyantes. Souvent, les titres sont rallongés, augmentés de longs solos électriques. Le groupe, en symbiose, s'abandonne dans ces plages de son tripantes, hypnotisantes. Tim Smith, l'air fatigué, communique très peu avec la salle - il semble dans son monde. Seul Eric Pulido (guitariste qui attire immédiatement la sympathie) échange quelques mots avec le sourire. "You're a very quiet audience. We suppose it's because you like it." Il ne croit pas si bien dire. Mais c'est évidemment lors des chansons du Trials of Van Occupanther (chef-d'oeuvre qui leur valut la consécration) que le public manifestera le plus son enthousiasme. "Bandits" et "Van Occupanther", puis "Young Bride". Malgré leurs arrangements différents (pratiquement sans claviers), les chansons restent superbes. Plus tard, le fabuleux "Roscoe" leur vaudra un tonnerre d'applaudissements. La version de "Head Home", pour clore leur setlist, fut un grand moment aussi.
Avec un peu de recul, on pourra se dire qu'il manquait un brin de magie, que Tim Smith n'avait pas la foforme (assez en retrait), qu'on aurait bien troqué une guitare pour un clavier, qu'une seule chanson en rappel ("Branches") c'est un peu maigre... Mais le plaisir de les voir enfin sur scène l'a totalement emporté. Un bien belle soirée.

Quelques images.





Eric Pulido, homme de l'ombre mais bras droit de Tim Smith. De son jeu brillant et de sa (seconde) voix indispensable, c'est lui qui a véritablement mené le groupe.

- L'élégance du hérisson, de Muriel Barbery.
Ce qui frappe d'emblée, c'est l'énorme différence avec le film (Le Hérisson) qui s'en est inspiré. Les deux oeuvres sont tellement différentes qu'il me paraît tout à fait normal de ne pas avoir gardé le même titre pour l'adaptation ciné. Le film était assez sympathique, une sorte de fable douce-amère pour toute la famille, avec une excellente Josiane Balasko.
Je ne pense vraiment pas que ce soit dû au fait que j'aie vu le film avant, mais j'ai eu un problème avec le roman. Je l'ai trouvé très poseur. L'auteur se regarde écrire. Son style est trop précieux, trop maniéré, trop pédant. Ce style sur-écrit et intello, elle le prête a deux personnages hautement improbables: une concierge ultra-cultivée qui s'emprisonne dans son antre pour mieux s'abandonner à l'élargissement infini de la connaissance, et une gamine (de l'immeuble) ultra-intelligente qui, à 12 ans, prétend vouloir se suicider, déprimée par la bêtise du monde. Toutes deux étalent leurs états d'âme (et, en passant, leur culture) et se s'accrochent à ces petites choses qui font la beauté de ce monde. Pendant près de 200 pages, ce n'est que ça. Un récit inexistant et des personnages prétextes servent de décor à un prêchi-prêcha de blogueuse qui veut étaler sa culture et sa maîtrise de la langue française. Certes, les observations ou élucubrations sont parfois cocasses et finement tournées, mais on espère toujours qu'il se passe quelque chose. Puis survient le personnage de Monsieur Ozu, homme beau, sage et bon, qui redonnera le goût à la vie de la gamine et tirera la concierge de sa solitude. Et en plus il est Japonais. Ils forment ainsi une espèce d'équipe de super intelligents qui ont tout compris à la beauté de ce monde.
Généralement crispant, le livre comporte quand même de jolis passages, et plusieurs petits "moments de la vie" (ce qui nous émeut, ce qui nous émerveille, ce qui nous désespère) résonneront certainement chez chaque lecteur. Par à coups, je mettais mes critiques de côté et me laissais prendre par ces moments drôles ou émouvants. Malheureusement, sur la fin, Muriel Barbery achève son histoire par un événement larmoyant au possible. Déjà un peu incongru dans le film, on y croit encore moins dans le roman.
En somme, il y a de belles choses, vraiment, mais j'ai trop de réserves pour garder un bon souvenir de ce livre.

Une fois terminé, je suis directement retourné chez Ken Follett et son Troisième Jumeau, grand classique au rayon suspense.
C'est autre chose que Les Piliers! Mais ça se dévore.

- Bright Star * de Jane Campion

Jane Campion, seule femme ayant déjà obtenu une Palme d'Or (pour La Leçon de piano), revient au film d'époque en mettant en scène John Keats, un des grands poètes romantiques, décédé prématurément d'une tuberculose. Bright Star (titre d'un de ces poèmes) n'est pas un biopic, mais une histoire d'amour (celle entre Keats et une jeune fille, jolie et cultivée).
Campion a certes le sens de l'image. Esthétiquement, le film est plein de grâce, on y trouve plein de ces petits moments très beaux, qui lorgnent sans vergogne vers du Malick... Reconnaissons aussi l'effort d'éviter le mélodrame torturé à tout prix, mais... Pas une seule seconde je n'ai vibré pour cette amourette, ronflante à souhait. C'est ennuyeux, c'est longuet. Reste la découverte de la jolie Abbie Cornish. Celui qui joue Keats, par contre, a le charisme d'une huitre.
Bref, "On aurait dû aller voir Gainsbourg."

jeudi 11 février 2010