lundi 28 janvier 2008

La Serbie en fête

Ayé, l'Open d'Australie est terminé. La Serbie est en fête. Pour la première fois, un Serbe remporte une levée de grand Chelem. Non pas la belle Ana Ivanovic, battue une Sharapova en grande foforme (elle n'a pas perdu un seul set), mais bien Novak Djokovic, vainqueur de J-Wilfried Tsonga, la révélation du tournoi qui fut a deux doigts de succéder à Yannick Noah, dernier français ayant remporté un titre du Grand Chelem (Roland-Garros, en 1983). Ce dernier avait écrasé en demis Nadal le baraki. Djokovic, lui, s'était débarrassé du Roi Roger, pas en grande forme, mais néanmoins auteur d'un nouveau record (15 demi-finales de Grand Chelem d'affilée...).
La saison 2008 commence donc bien, sans la suprématie de Federer et de notre Juju, explosée par Sharapova - et curieusement ça m'a fait plaisir. Le changement, sans doute.

Bon trève de blabla, place aux photos...


Ivanovic: Action


Djokovic: réaction

Et pour ceux qui n'ont pas l'esprit mal tourné et qui préfèrent l'humour normal, revoici la vidéo dévoilant les talents d'imitateurs de Djokovic... A vous de reconnaître Federer, Nadal, Roddick, Sharapova...

Un peu d'animation (1)

Ce film a été réalisé sans trucages numériques. C'est de la pure animation image par image. Respect.

dimanche 27 janvier 2008

You can't stop what's coming


Décidément, l’année ciné 2008 commence vraiment bien. Nous ne sommes qu’en janvier, et on tient là un des meilleurs films de l'année.
« Les frères Coen sont de retour »... C’est ce qu’affirme assez unanimement la critique, mais aussi le public… De retour à quoi ? Après les légèretés peu mémorables de Intolerable Cruelty et Ladykillers, ont peu dire qu’ils sont de retour à la noirceur, à leur humour sanglant... Et à leur immense talent. No Country For Old Men, adapté du roman de Cormac McCarthy, est une leçon de maîtrise proprement époustouflante. La force du scénario n'est pas dans l'intrigue (au Texas, un type ordinaire, qui trouve une valise pleine d’argent, se fait pourchasser par une tueur diabolique… Un shérif mène parallèlement l’enquête), mais dans la manière dont les trois protagonistes s'inscrivent dans cette spirale de la violence. Et si l’histoire est bonne, c’est aussi et surtout la façon dont le récit est mené. La linéarité est pimentée par des dialogues plus que parfaits, par une sens de tempo jouissif, des ellipses saisissantes, une utilisation brillante du silence (et donc du son), et une distillation savante d’un humour qui sort de nulle part, absurde, macabre, qui fonctionne à merveille. Les cadrages, superbement éclairés par le fidèle Roger Deakins (L’Assassinat de Jesse James…), sont millimétrés. Grâce à leur mise en scène, aussi subtile qu’efficace et d’une précision chirurgicale, les frères Coen nous offrent une série de scènes d’anthologie qui laissent bouche bée, notamment quelques face-à-face (dialogués ou ensanglantés) d’une tension inouïe.
J’avais presque oubliés à quel point les frères sont des monstres de la mise en scène… et de la direction d’acteurs ! Javier Bardem (photo) est simplement i-nou-bli-a-ble dans la peau de ce tueur psychopathe, cet ange exterminateur à la coiffure ridicule. Mais il ne fait pas d’ombre au talent de Josh Brolin, parfait. Tommy Lee Jones, lui aussi, est au sommet. Son personnage porte en lui toute la noirceur du film, mais aussi toute sa mélancolie. Le cut au noir final finit de clouer le spectateur dans son fauteuil, accablé par l’amertume de cette sombre histoire. Et par la puissance du film, monumental. No Country For Old Men est un classique instantané… qui vieillira bien. Un des meilleurs films des frères Coen, juste derrière Fargo (leur chef-d’œuvre au rayon sanglant), et The Big Lebowski (leur chef-d’œuvre au rayon comédie…).

Tiens, à propos de Fargo, je ne résiste pas à l'envie de poster cette petite vidéo qui fait honneur au fameux « Yah ! », qui ponctue le délicieux accent du Minnesota...

samedi 26 janvier 2008

Le bonheur n'existe qu'une fois partagé


C'est ce que nous dit le très beau film de Sean Penn, qui retrace l'histoire vraie de Christopher McCandless, un jeune américain de 24 ans qui décide, une fois le diplôme en poche, de partir pour quelque temps à l'aventure, en pleine nature, Into The Wild. Une furieuse envie de vivre sous le sou, et de se laisser aller au gré des rencontres, au rythme des saisons et à travers toute la diversité des paysages de l'Amérique sauvage, aussi dangereux soient-ils. Aidé par la musique d'Eddie Vedder et la photo d'Eric Gautier (Diarios de Motocicleta), Penn signe un film fleuve d'une grande profondeur spirituelle, en rend un superbe hommage à ce jeune garçon complètement hanté par sa quête. Quête de quoi? Lui-même ne le savait pas très bien. Son voyage, qui a duré plus de deux ans, était une fuite. Fuite de la société matérialiste, de sa famille pourrie par le mensonge. Mais peut-on aussi fuir totalement la civilisation, fuir les autres, fuir sa vie, fuir la vie ? Le film pose question… et marque durablement. Un film à ne pas rater, sur grand écran.

jeudi 24 janvier 2008

This is not a joke


Mercredi matin, comme tous les matins, je sors de chez moi en prenant le journal. Comme tous les mercredis, je commence par le tableau des étoiles du cahier cinéma. Mais aujourd’hui, mon regard s'arrête net sur la une. “Heath Ledger retrouvé mort. p19” Je fonce page 19, complètement incrédule. Je lis à toute vitesse la dépêche qui ne m’apprend rien, sauf qu’il est mort. Heath Ledger est mort. Il n'avait que 28 ans. C'est moche, c'est triste. Je n'arrive toujours pas à y croire. A l'heure qu'il est, son autopsie ne nous a encore rien appris, mais il semblerait qu'il ait fait une overdose de somnifères. Le tournage de The Dark Knight, dans lequel il tient le rôle du Joker (photo), l'aurait éreinté. Mais peu importe: Heath Ledger est mort. Une fille de deux ans se retrouve sans père, et le cinéma a perdu un de ses acteurs les plus prometteurs.
Je le connaissais peu: je l'avais repéré avec son petit rôle dans Monster’s Ball, puis vraiment découvert en 2006 dans Brokeback Mountain, où il est magnifique (nomination à l'Oscar à la clé), et dans The Brothers Grimm, où il fut le seul intérêt du film.

Quant à The Dark Knight, la suite ultra attendue de Batman Begins, il sortira cet été. L'excellente campagne de teasing ne fait que renforcer le buzz sur la performance de Ledger, paraît-il hallucinante. Son décès lui donnera, tristement, une dimension encore plus fantomatique.

mardi 15 janvier 2008

Barry sur grand écran


Ceci n’est pas un tableau d’un peintre flamand du XVIIème siècle, mais bien une image de Barry Lyndon (1975), mon préféré des quelques chefs-d’oeuvre de Stanley Kubrick, un des plus grands génies du 7ème art. Electrochoc esthétique (ces éclairages en lumière naturelle ou à la bougie, les fameux zooms, sans oublier la meilleure voix off jamais écrite, ainsi que la fameuse BO) mais également terrible drame humain, Barry Lyndon est un film épuisant de beauté et d’intelligence, une oeuvre monumentale qui défie le temps ; pour un film historique, c’est un beau compliment.
Cinebel, le portail du cinéma en Belgique sur la toile, a pris l’initiative de projeter tous les trois mois des « films qui tuent sur grand écran », au “Musée du cinéma (bis)” (provisoirement situé Rue Ravenstein pour cause de rénovations). Et c’est donc samedi soir qu’un de mes fantasmes cinématographiques s’est réalisé. Certes, la copie était un peu dégueulasse (griffes, taches, photogrammes manquants…), mais ce fut bel et bien le bonheur attendu. Les 182 minutes passent évidemment comme un coup de vent, et même à la énième vision (j’en suis à 8, je crois), au-delà de la magnificence visuelle, sonore et dramatique, ce film reste sidérant de maîtrise et de perfection du premier au dernier carton. Tant de choses resteront à jamais gravées dans mon cœur et ma mémoire de cinéphile : l’ironie de la voix off, la rencontre entre Barry et Lady Lyndon où Schubert remplace les mots, l'humour pince sans rire, les scènes de batailles qui paraissent absurdes, le jubilatoire Révérend Runt, ce cut hautement lacrymogène sur le petit cercueil blanc (et Haendel qui en remet une couche avec sa Sarabande), le duel final dans la grange, l’image figée sur les béquilles, la toute dernière scène… Un authentique chef-d’œuvre, à voir et à revoir. Même en DVD.

dimanche 6 janvier 2008

Vivre avec un chat (2)

Mimi le chaton II
Vidéo envoyée par deudtens

Petit court hilarant réalisé par deudtens, réalisateur très patient...

vendredi 4 janvier 2008

Je crois à une "troisième voie"

Lettre de Cédric Klapisch (réalisateur de Chacun cherche son chat, L'Auberge Espagnole, Ni pour ni contre (bien au contraire), Les Poupées Russes,...) à Nicolas Sarkozy:


Monsieur Sarkozy, vous demandiez récemment à Mme Albanel, ministre de la culture et de la communication, de relancer la démocratisation culturelle en la définissant ainsi : "La démocratisation culturelle, c'est veiller à ce que les aides publiques à la création favorisent une offre répondant aux attentes du public." Cette petite phrase anodine cache en fait le drame qui touche depuis quelques années le secteur du cinéma.

(…) Ce n'est pas seulement à vous que je m'adresse ici, mais à tous ceux qui font aveuglément confiance aux "attentes du public", sans mesurer à quel point la diversité culturelle est ainsi menacée.

(…) On a souvent reproché au cinéma français d'être snob, prétentieux, intello, "prise de tête", et je dois vous avouer que je l'ai aussi beaucoup pensé. (…) C'est même assez étrange pour moi de m'être battu pendant des années pour affirmer la nécessité d'un cinéma populaire et de me retrouver à défendre aujourd'hui un cinéma non pas élitiste mais "culturel". J'ai toujours pensé qu'on pouvait faire des films commerciaux en refusant de prendre les spectateurs pour des imbéciles. Je crois à une "troisième voie" qui refuse la sempiternelle opposition : film d'auteur, film commercial.

Un député européen me demandait récemment : "Pourquoi n'y a-t-il pas d'Harry Potter européen ?" Est-ce réellement ce que vous attendez tous ? Est-ce là votre seul rêve culturel : un film absolument sans auteur et sans saveur dont la seule valeur est d'être un succès ? Je comprends que, dans d'autres domaines, vous soyez en attente de résultats industriels. Mais, dans le cinéma, nous préférerions que les personnalités politiques nous incitent à être originaux ou audacieux, plutôt qu'à faire du chiffre.

Aujourd'hui, ce qui nous inquiète, nous, réalisateurs, c'est d'assister à la lente et insidieuse disparition de ce qui pourrait surprendre ou éveiller le public. Il y a de fait un appauvrissement culturel dans notre pays et les élites n'envisagent même plus de travailler à le ralentir. (…)

Si nous aidons les spectateurs à fuir la réalité avec nos images, notre but est aussi que ces images les renvoient autrement à la réalité. Le cinéma doit sans doute divertir, mais il doit aussi avertir. Un réalisateur doit plus aider les gens à se "tourner vers" qu'à se "détourner". Il ne doit pas "endormir", mais donner à voir, informer, éveiller la curiosité.

Woody Allen m'a averti des paradoxes du couple. Federico Fellini m'a éclairé sur les mystères de la masculinité, Jane Campion sur les mystères de la féminité. Jean Renoir m'a parlé de ce qui dépasse les classes sociales, Charlie Chaplin de ce qui n'échappera jamais aux classes sociales, Abbas Kiarostami de l'intelligence contenue dans la simplicité, Jean-Luc Godard de la simplicité contenue dans l'intelligence, Martin Scorsese de la beauté de la violence, Alain Resnais de l'horreur de la violence, Pedro Almodovar du fantasme contenu dans le réel, Alfred Hitchcock du réel contenu dans le fantasme...

Tous ces cinéastes m'ont aidé à vivre. Ils m'ont autant diverti qu'averti. Ils m'ont aidé à aborder des problèmes quotidiens sans me donner de leçons. Ils m'ont donné des éléments de réflexion sans que je sache que c'était de la réflexion. Ce "reflet" du monde n'est pas juste un effet de miroir, c'est ce qu'on appelle un regard. Bizarrement, plus ce regard est personnel, plus il sera universel. Moins il sera consensuel et formaté, plus il sera général. La culture a ceci de particulier qu'elle n'est pas conçue a priori pour satisfaire le public, même si au fond elle s'adresse à tous. (…)

En matière d'environnement, on sait aujourd'hui que seule l'audace politique peut infléchir les effets pervers de l'industrie. En matière culturelle, il devient indispensable de contrebalancer les effets pervers du marché. Nous ne voulons pas une culture assistée, nous voulons une culture protégée.

(…) Il est difficile d'inventer une politique qui aide la création, mais le manque d'idées politiques mène à l'acculturation. Se borner à laisser faire le marché en matière de culture, c'est tuer la culture.

Cédric Klapisch