jeudi 19 juin 2008

Symphonie familiale


Tenter de résumer Un Conte de Noël n’a ni beaucoup de sens (il serait de toute façon réducteur) ni d’intérêt: le mieux est de tout découvrir in situ. En gros, il s’agit de retrouvailles en famille. La mère est malade, le fils est mal-aimé, la fille est déprimée, le neveu est instable, un autre est secrètement amoureux de la femme de son cousin... Tous seront confrontés à leurs liens de sang. Les plaies seront ouvertes (ou non), pansées (ou non). Quelques règlements de compte en perspective, certes. Mais pas seulement. Arnaud Desplechin prend les codes du genre à rebrousse-poil pour toujours nous surprendre, par ses mots, ses images. Sa mise en scène, baroque mais élégante, utilise fondus enchaînés, très gros plans, ombres chinoises, intertitres, iris et monologues face caméra... Avec sens, intelligence et une virtuose fluidité. On peut adhérer ou pas, mais on ne peut renier son talent inouï pour l’écriture (les dialogues sont brillantissimes, de bout en bout) et la direction d’acteurs (tous*, ou presque, sont merveilleux). Mathieu Amalric est une fois de plus fascinant.
Le résultat est un foisonnant magma de mots et d’images, de gags et d’émotions, de vie et de souvenirs... Une enivrante fresque pleine d’humour grinçant, de drames, de cruauté et d’affection, de haine et d’amour, de détresse et de tendresse, de cœurs qui battent plus fort que jamais ou qui ne battront bientôt plus. Un film puissant qui a un corps et une âme, de la chair et de l’esprit. Toutefois, même si l’on est happé par le rythme très soutenu, l’émotion nous glisse parfois entre les doigts... tant le film est dense. Dense mais qui est toujours intéressant... et beau. La toile vibre de vie pendant 2h30 et on ne s’ennuie pas une seule seconde. Ça se digère très lentement.

*Casting de feu: Catherine Deveuve, Mathieu Amalric, Chiara Mastroiani, Emmanuelle Devos, Anne Consighy, Melvil Poupaud, Hippolyte Girardot, Jean-Paul Roussillon...


Arnaud Desplechin

2 commentaires:

Clic a dit…

"Ca se digère très lentement" .. ça se rumine, oui !

Brillantissimes, les dialogues ? C'est peu dire. Au point qu'on n'a pas envie que l'un ou l'autre ait le dernier mot. D'ailleurs, ils ne l'ont jamais.
c'est sans oublier également, le joli volte-face-trottoir..

Arnotte a dit…

Oui, c'est vrai. Il devrait écrire des séries télé, en fait!
Pour la scène du trottoir, je ne sais pas quel artifice ils ont utilisé, mais j'ai lu dans un article que ce n'est pas un cascadeur, et Desplechin avait dit à Amalric: "Tu vas du plus loin que tu peux."