samedi 13 mars 2010

Tonight will be fine

C'est bon, l'hiver, là, ouste. On t'a bien vu, merci. Du vent. Enfin, je veux dire... Du balai.
Bon. Quelques petites choses à raconter.

- Leonard Cohen Live at the Isle of Wight 1970


Nous sommes le 30 août 1970, au troisième Isle of Wight Music Festival. C'est le dernier soir. Il est 2h du matin. Leonard Cohen, 35 ans, se fait réveiller dans sa caravane. Vers 4h, Leonard monte enfin sur scène, en pyjama. Parmi ses musiciens, Bon Johnston (producteur de son Songs from a room). Devant eux, 600.000 (SIX. CENT. MILLE.) spectateurs - un record absolu pour l'époque. Une foule immense qui a transformé l'île en véritable chaudron. En cinq jours, le festival s'est transformé en arène politique. Barrières renversées, structures incendiées... Les forces de l'ordre ont dû lutter pour calmer la foule. Celle-ci est encore d'humeur bouillonnante, attisée par la prestation de Jimi Hendrix (qui mourra moins de trois semaines plus tard), une de ses plus incendiaires. Mais Leonard Cohen, armé de sa guitare sèche, et par la seule grâce de ses chansons, domptera la foule. La foule est littéralement "calmée", comme on dit. Les gens sont happés. Hypnotisés. Boulversés. En coulisses, Joan Baez, Judy Collins et Kris Kristofferson assistent à cet instant magique. Le cinéaste Murray Lerner est là avec sa caméra pour ne pas rater un instant. Bob Johnston se souvient: “It was magical, from the first moment to the last. I’ve never seen anything like it. He was just remarkable.” A voir le film de Lerner, et à écouter le CD (le concert intégral), on ne peut que le confirmer. Fabuleux. La bande-annonce ici.




- Le Troisième Jumeau, de Ken Follett.
Un "thriller éthico-scientifique" très bien ficelé qui entretient une belle tension jusqu'à la résolution finale. Follett s'est comme toujours documenté en profondeur pour donner plus de réalisme à cette sombre histoire de manipulations génétiques. Cette "science-fiction" est à peine en avance sur son temps... La science rattrapera vite la fiction, et les questions morales resteront toujours accrochées aux progrès fulgurants de la médecine. Seul regret: que le résumé en quatrième de couverture (et même le titre) en dise déjà trop sur l'intrigue (la moitié du livre, en somme).


- Nathan le Sage, de E. G. Lessing (adaptation de Gaston Compère), au Théâtre de la Place des Martyrs
Une fable philosophique où trois religions se croisent, se rencontrent, s'affrontent et qui au gré des joutes verbales (et des rebondissements) trouveront un terrain d'entente, de fraternité. Une pièce intéressante mais qui manque de fulgurances. Je retiens quelques bons comédiens, un joli décor et, surtout, un moment qui a retenu l'attention de tous: la parabole de l'anneau, où le message de la pièce (la tolérance religieuse) prend tout son sens. Petite explication wiki par ici.


- Deux beaux films:

An Education ***, de Lone Scherfig

Belle surprise. Ce n'est pas que je doutais de Nick Hornby (les films adaptés de ses romans sont généralement bons: High Fidelity, About a Boy...), mais j'ignorais ses talents de scénariste. La force du film de Lone Scherfig (réalisatrice danoise débarquée à Hollywood), c'est avant toute chose son scénario. En somme, l'histoire est d'une grande simplicité, mais elle est magnifiée par ce script malin et délicieux, aux dialogues soignés et d'une grande finesse psychologique. Les clichés attendus sont déjoués de manière subtile, et les changements de tons (comique, dramatique) sont habilement menés. Ce doigté apporte au film une vigueur rafraichissante et accroît son impact émotionnel. Mais la réussite du film doit aussi beaucoup à son casting étincelant. Alfred Molina, Olivia Williams, Rosamund Pike, Peter Sarsgaard... Tous sont excellents. Mais c'est Carey Mulligan, vraie révélation, qui crève l'écran. Avec ce film (et sa nomination à l'Oscar), sa carrière doit logiquement jouir d'un boost phénoménal. Ca fait plaisir.

A Single Man ***, de Tom Ford

Pour ce premier film du styliste Tom Ford, on pouvait s'attendre à un film tiré à quatre épingles. C'est le cas. Mais l'esthétisation extrême du film, superbe en soi, n'a pourtant rien de factice, elle souligne même à merveille l'état de George, cet homme gris et endeuillé qui vit enfermé dans le passé. Le temps qui distille le quotidien ne lui fait entrevoir aucun avenir. Mais aujourd'hui, une journée qu'il qualifie lui-même de "fatidique", il connaîtra à la fois les pulsions d'Eros et de Thanatos, de quoi le raccrocher un peu plus au présent - Dieu sait pour combien de temps. Le film fonctionne par évocations et illustrations: ses souvenirs de Jim, l'amour de sa vie, son amitié avec son amie Charlie (Julianne Moore, la classe), sa maison de verre, son métier de professeur, ses avances reçues ici et là. Cela suffit pour dresser le beau portrait d'un homme au coeur brisé. L'esthétique très léchée entraîne le film dans une espèce de grâce éthérée, et laisse transpercer, par moments, une émotion poignante. Mais le film ne serait rien sans l'interprétation exceptionnelle de Colin Firth, dans le plus beau rôle de sa carrière.

2 commentaires:

Chris a dit…

Le troisième jumeau... Le "Ken" avec lequel j'ai le moins accroché... L'impression d'avoir toujours un coup d'avance sur l'histoire, j'ai pas été surpris...

Par contre je ne sais pas si tu as lu, mais je suis en plein Dracula de Bram Stoker (le vrai quoi). Suspense tout en douceur au début qui suit une progression continue tout au long du déroulement de l'histoire... Tout bon... Là il y a de la vraie tension ! Rares sont les livres qui m'ont suivi dans mon sommeil au point de me réveiller en sueur me touchant le cou pour voir si j'étais toujours entier... ;-)

J'te l'prête dès que je l'ai fini si tu veux...

Arnotte a dit…

Je vois ce que tu veux dire... Mais je pense qu'avec un autre titre et sans "résumé" qui te raconte la moitié de l'histoire, ce serait différent... Je sais pas. Ca reste super bien mené en tout cas.

Dracula je suis super intéressé! Mais là je viens de commencer un Kafka donc ça sera pas pour tout de suite.. :)