vendredi 6 février 2009

Conte à rebours

"Then it was all dark, and his white crib and the dim faces that moved above him, and the warm sweet aroma of the milk, faded out altogether from his mind." Ainsi s’achève The Curious Case of Benjamin Button, la nouvelle de F. Scott Fitzgerald, datant de 1921. L’histoire d’un homme qui naît dans la peau d’un vieillard et qui rajeunit de jour en jour. Poétique, elliptique, métaphysique. Une histoire courte mais marquante, qui a dû bien séduire quelques producteurs de cinéma durant des décennies. Mais ce n’est qu’aujourd’hui que cette histoire a été portée à l’écran, puisqu’avec les miracles des effets spéciaux d’aujourd’hui, tout est possible. Donner à Brad Pitt une apparence d’un centenaire, ou à l’inverse, lui rendre celle de sa jeunesse, époque Légendes d'Automne et posters dans 7 Extra. Il retrouve ici pour la troisième fois David Fincher, qui l’avait dirigé dans deux des films les plus marquants des années 90 : Se7en et Fight Club. Une collaboration qui porte décidément ses fruits. Nous avons là un grand film.
Je ne m’attarderai pas sur la réussite visuelle, habituelle chez Fincher, un vrai perfectionniste de l’image. La claque esthétique a bien lieu, et c’est un régal de cinéma, merci bien. S’il reste passionnant dans la forme (ce Button entretient d’ailleurs un passionnant rapport à l’histoire du cinéma, au cinéma dans l’histoire – vaste débat), Fincher l’est encore plus sur le fond. C’est que le matériau de base est un trésor, et qu’avec son scénariste Eric Roth (Forrest Gump), Fincher a su lui rendre justice. En donnant à cette histoire l’ampleur d’un film fleuve (elle méritait bien ça), ils en ont exploré l'infinie richesse thématique (dont une inévitable réflexion sur le temps qui passe, sur le côté éphémère de toute chose) et tout le potentiel émotionnel. Pour cela, ils ont eu l’intelligence de garder l’histoire pour ce qu’elle est : un conte. Ainsi, l’anomalie du héros n’est jamais expliquée. D’ailleurs personne ne cherche à la comprendre. Le conte laisse ainsi champ libre à cette histoire d’amour peu banale et forcément dramatique. Puisqu’on en devine l’issue cruelle, le film a l’intelligence de nous éviter le pathos kleenex. Il n’en est pas moins bouleversant par toutes les réflexions sous-entendues. Pas métaphysiques. Humaines.
Les dix dernières minutes, mémorables, passent trop vite, on a l'impression de rater des trucs et tout, mais finalement… I was thinking how nothing lasts, and what a shame that is. Si les 2h45 filent à toute vitesse, il est difficile de se relever de son fauteuil après le générique de fin. Difficile de s’endormir le soir. Hanté.
A moins que ce ne soit à cause de Cate Blanchett, qui n'a jamais été aussi sublime. Absolument sublime.


Et c’est l’occasion de faire enfin un peu de pub pour le
blog de Julie, qui est passionnée par la danse, et pour tout dire obsédée par la danse au cinéma. Elément très présent dans Benjamin Button, elle décortique tout ça et c'est très intéressant.

1 commentaire:

Pineapple Jukebox Dance Show a dit…

Merci beaucoup pour ce lien Arnotte, ça fait super plaisir!
Et très intéressant ton billet, j'aime bien voir comment chacun arrive à se dépatouiller d'un film aussi touchant...