Avatar, de James Cameron.
Malgré sa paralysie, Jake Sully, un ancien marine immobilisé dans un fauteuil roulant, est recruté pour se rendre à des années-lumière de la Terre, sur Pandora, où de puissants groupes industriels exploitent un minerai rarissime (sans doute destiné à résoudre la crise énergétique sur Terre). Parce que l'atmosphère de Pandora est toxique pour les humains, ceux-ci ont créé le Programme Avatar, qui permet à des "pilotes" humains de lier leur esprit à un avatar, un corps biologique commandé à distance, capable de survivre dans cette atmosphère létale. Ces avatars sont des hybrides créés génétiquement en croisant l'ADN humain avec celui des Na'vi, les autochtones de Pandora. Sous sa forme d'avatar, Jake peut de nouveau marcher. On lui confie une mission d'infiltration auprès des Na'vi, devenus un obstacle trop conséquent à l'exploitation du précieux minerai. Mais tout va changer lorsque Neytiri, une très belle Na'vi, sauve la vie de Jake... (synopsis Allocine.fr)
Le voici le voilà. Onze ans après Titanic, James Cameron revient avec, une fois de plus, le film le plus cher de l'Histoire du cinéma (dit-on). Qu'est-ce que ça vaut? Certaines critiques encensent, d'autres descendent... Essayons de faire la part des choses à tête reposée.
Effectivement, le film ne brille pas par son scénario : l’histoire rappelle de manière trop évidente celle de Pocahontas et John Smith, les dialogues ne sont pas toujours bons, les personnages ne sont pas tous aboutis, la culture des extraterrestres (les Na’vi) déçoit légèrement (trop de clichés)... Cameron ne s’est visiblement pas encombré d’un scénario intello-fumeux à la Matrix, et même s'il a imaginé un monde de A à Z, il n'a rien inventé. Tout est en quelque sorte "déjà vu", par-ci par-là... Les rabat-joie ont de quoi se faire les dents.
Pourtant, Avatar offre bel et bien du "jamais vu", et s'avère un spectacle franchement incroyable. Ne vous fiez pas aux bandes-annonces et photos vues sur le web : visuellement, le résultat est simplement extraordinaire. Avatar, si du moins on le voit dans des conditions optimales (3D obligatoire!), se dévore d’un bout à l’autre les yeux écarquillés, l’air ébahi, la bouche bée. C’est à tomber par terre. Nombreux sont les films qui ont déjà montré des interactions très convaincantes avec des personnages numériques (Gollum, c’était quelque chose), et l’on voit aujourd’hui des fabuleuses incrustations d’images de synthèse dans les images réelles (District 9, dernier - et meilleur – exemple en date). Mais avec Avatar, le rendu des images de synthèse a atteint ici le stade de la fusion ultime. On ne voit plus la différence entre pixels et images réelles, à tel point que lors de la projection, la magie s’opère : on ne se pose plus la question. Nous sommes "entrés dans le monde", comme le dit l’affiche. Pour cela, le film fait indiscutablement date dans l'histoire des effets spéciaux. Certains parlent d'une date dans l'histoire de l'esthétique au cinéma. Attendons de prendre un peu de recul, mais il est clair qu'on sort de la projection avec l’impression d’avoir vu le cinéma faire un bond en avant. Une impression d'autant plus euphorisante qu'elle nous est offerte à l’aube de la nouvelle décennie. A ce niveau-là, le film tient donc ses promesses. Là-dessus, on pouvait compter sur James Cameron, féru depuis toujours de nouvelles technologies et pionniers des effets spéciaux modernes (rappelez-vous le T-1000 de Terminator 2 ou la reconstitution du naufrage du Titanic).
Ainsi, malgré une intrigue relativement faible (d’autant plus que quelques coupures se font ressentir ici et là – la version longue ça sera pour le DVD) et les quelques clichés, Cameron assure le spectacle, et s'éclate tant que possible dans son élément: le cinéma-spectacle, le plus diverstissant qui soit. Outre la découverte émerveillée de la planète Pandora, on y compte les scènes mémorables, toutes magnifiées par une 3D ultra immersive mais jamais ostentatoire. Toute la phase d’apprentissage de Jake, notamment le dressage des Ikran, est fabuleuse. Avant, il y a cette scène jouissive où Jake se réveille pour la première fois dans son avatar, et retrouve le plaisir de courir sur ses deux pieds. La guerre de la dernière demi-heure, qui sort la grosse artillerie, vaut son pesant de spectacle. Malgré les soucis de scénario déjà évoqués, il y a de quoi pétrir les accoudoirs de fauteuils jusqu’à la fin. Les 2h40 passent comme une lettre à la poste.
Dans Avatar, Cameron nous raconte que l’Histoire de l’humanité se répète sans cesse : même dans deux sciècles, il y aura toujours des hommes pour en persécuter d'autres et leur prendre ce qu’ils possèdent, de céder à la violence quand la diplomatie ne fonctionne pas. Il y aura toujours des hommes avides de conquête, de pouvoir, d’argent (peu importe de savoir, d'ailleurs, à quoi peut bien servir cette si précieuse rocaille bleue, avatar futuriste de l’or, du pétrole…). Le discours a beau être toujours d’actualité, c'est ailleurs que le film passionne: l’œuvre mutante qu’est Avatar puise beaucoup de son sens et de sa raison d’être dans son simple dispositif esthétique - bien plus que dans son histoire de cow-boys et indiens. Son esthétique de "fusion", s’avère en effet porteuse d’idées passionnantes, à commencer par l’idée de base du film : le principe de l’avatar. Quoi de plus normal, dans un monde où le pixel est confondu avec le réel, que de pouvoir "se connecter" dans la peau d’un autre pour passer d’un monde à l’autre ? Mais à l’inverse de Matrix, où le monde réel était opposé au monde numérique, Avatar fusionne les deux en proposant une alternative à la fois virtuelle/électronique et charnelle/biologique: pixels et molécules sont à pied d’égalité. Dans ce décor de pixels invisibles, la lutte entre la technologie et nature peut avoir lieu. En point d’orgue de cette lutte, on assiste à un combat au corps à corps plus vrai que nature entre l’envahisseur et l’envahi (mais chacun est l’alien de l’autre), le premier contrôlant son exosquelette guerrier, le deuxième contrôlant son animal grâce au réseau de "connexions" qui existe entre tous les êtres vivants de Pandora (qui rappelle à la fois réseau électrique et réseau neurologique).
Evoquons pour finir le parcours du personnage de Jake. Il ouvre les yeux à deux reprises : la première fois quand le film commence, la deuxième fois quand il se termine (mémorable dernier plan). La première fois dans sa peau d’humain, ayant quitté son ancienne vie, la deuxième fois dans la peau de son avatar, nouvelle naissance dans un nouveau monde. La transition est faite.
PS : Blâme public pour James Horner, qui s’auto-caricature et avec une BO qui manque cruellement d’originalité. Dans un projet qui a déployé tant d’efforts de création, je trouve ça assez scandaleux.
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